lundi 10 septembre 2007

Le feuilleton

Un véritable feuilleton !

L’affaire démarre sur des courriers de dénonciation anonymes envoyés en juin 2005 à la direction d’Air Tahiti Nui.
Ces courriers (aux dates pour le moins fantaisistes), transmis au parquet, suscitent l’ouverture d’une enquête confiée à la BRI sur plusieurs PNC mis en cause ainsi que sur l’auteur des courriers. Cette enquête est menée très sérieusement et de nombreuses investigations seront faites (IEOM, CPS, OPT, VINI) sur les PNC cités.

Durant le mois de septembre 2005, un PNC se fait arrêter par la douane en possession de produits stupéfiants. Interrogé le 23 du même mois, il donne 9 noms de personnels ATN impliqués ainsi que le prénom de son dealer à Los Angeles.

Indépendamment de cette affaire, en novembre 2005, les agents des Forces d’Immigration et de Douanes de Los Angeles (ICE) ouvrent une enquête sur un trafic de drogues entre les USA et Tahiti.

Le 8 décembre 2006, un autre PNC « M » apparaît dans l’enquête. Arrêté par les douanes en novembre en possession de substances stupéfiantes, il est auditionné par la BRI. Son PV d’audition n’est pas numéroté. Lors de cette audition, il donne « spontanément » une liste de noms de 35 collègues de travail avec leurs consommations supposées. Il précise même qu’il aurait personnellement consommé avec 10 d’entre elles. Des précisions… douteuses puisqu’il confond certains prénoms, parlant même au féminin d’un steward qu’il dit pourtant connaître au point d’avoir « consommé » avec lui !
Lui aussi cite le même prénom du dealer de Los Angeles.

La BRI fait alors le recoupement avec les déclarations du premier. Et les auditions de tous les PNC cités par « M » commencent le 27 mars 2007 sous un N° de PV. Des auditions faites visiblement à charge, et sur des cadres pré-établis de questions-réponses qui ne traduisent pas véritablement la teneur des conversations et des confessions obtenues sous le sceau du secret ( « on ne cherche que les trafiquants, les consommateurs ne nous intéressent pas, ATN ne sera pas mise au courant »). Les heures indiquées sur certaines auditions sont elles aussi visiblement erronées, car elles se chevauchent. D’autres ne durent que 4 minutes… Le 25 avril, le numéro de PV inscrit sur les auditions change jusqu’au 2 mai ou, exceptionnellement, un autre gendarme auditionne une hôtesse et n’utilise pas l’ordinateur du premier. Il reprend donc tout naturellement le numéro inscrit sur le dossier de base. Ce mélange de numéros de PV se retrouve d’ailleurs jusqu’à la clôture de l’enquête et sa transmission au Parquet.


(Pendant ce temps, à Los Angeles, l’agent de l’I.C.E. cherche à arrêter le fameux dealer. Il intercepte, à leur arrivée à l’aéroport de LAX, plusieurs PNC cités par « M » et leur demande de l’aider à le « coincer » en leur disant que s’ils acceptent, cela restera secret et que personne ne sera au courant, y compris leur employeur, mais que, s’ils refusent, il leur fera retirer leur visa US).


Le 22 avril, le dealer est arrêté à Los Angeles et dans sa déposition « donne » comme « gros » acheteurs, les noms des PNC qui ont contribué à son arrestation.

Début mai, le gendarme responsable de l’enquête de la BRI se rend aux Etats Unis pour rencontrer l’agent spécial et interroger le dealer. Il est pressé de boucler son dossier et convoque le PDG d’ATN, Monsieur Jeffry Salmon, le 23 mai pour lui annoncer que 30 PNC sont des consommateurs de drogues dures et 2 PNC sont des importateurs. Il doit être réellement pressé puisque les auditions ne sont même pas encore terminées, elles ne prendront fin que le 1er juin à 17h00 ! Mais il sait visiblement déjà ce que les suivants vont lui « avouer » ! Qu’à cela ne tienne !
D’après le PV de synthèse, cette enquête qui s’est étalée sur 2 ans et qui a mobilisé toute l’énergie d’un officier de gendarmerie pendant cette période, se résume après 118 auditions diverses, à 31 auditions de PNC qui reconnaissent avoir consommé diverses drogues quelques années auparavant. Certains ont par exemple reconnu avoir fumé du « pakalolo » au lycée ! La grande majorité d’entre eux conteste d’ailleurs les dates inscrites sur leur PV : « Il y a 6 ans » est devenu « il y a 6 mois » par exemple ! Deux personnes reconnaissent l’importation de drogues dures. Trente autres PNC nient, certains contre toute évidence, la moindre implication. Et 55 noms ont mystérieusement disparus...

Début Juillet, Air Tahiti Nui envoyait, dans la presse locale et internationale, des communiqués de presse déclenchant une série de gros titres, dommageables pour son image : « un trafic d’ice », « coup d’arrêt à la filière drogue », « une trentaine de personnels navigants accusés d’usage et d’importation de drogues » etc…

Dans la foulée, la compagnie, visiblement très bien informée, licenciait, sans attendre un éventuel jugement et sans respecter le moins du monde la présomption d’innocence, les 31 PNC dont les PV d’auditions montraient qu’ils reconnaissaient une consommation quelconque à un moment quelconque.

Mi-août, ces mêmes 31 recevaient une convocation devant le juge d’instruction. Les auditions par le juge, beaucoup plus attentif que le gendarme, sont maintenant terminées. Tous les PNC entendus se sont vu signifier leur mise en examen et passeront sans doute devant le Tribunal, bientôt ? En attendant, ils n’ont pas le droit de quitter le Territoire, ni de communiquer entre eux sur l’affaire.

Suite au prochain numéro !...

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